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L'exode meurtrier de Srebrenica représente "l'événement le plus répugnant de cette guerre", pour reprendre les termes utilisés par le procureur du Tribunal Pénal International. Devant l'horreur et la barbarie de la tragédie vécue à partir du 11 juillet 1995 par les habitants de la ville, la commission estime ne pas devoir distinguer les victimes, selon qu'elles ont été atteintes dans leur intégrité corporelle, physiquement ou seulement psychiquement. En effet, affaiblis par les séquelles physiques et psychiques engendrées par le siège de la ville, les privations et les bombardements, la grande majorité des Musulmans de l'enclave ont été témoins, lorsqu'ils n'ont pas été personnellement et directement touchés, de la séparation brutale des familles, des premières exécutions, disparitions et autres atrocités qui avaient pour but de les intimider ou de faire pression sur eux pour des motifs discriminatoires, dans un climat de peur panique, d'horreur et de détresse provoquées et entretenues par les troupes serbes bosniaques; indépendamment de son sexe, de son âge, de son appartenance au premier ou au second groupe de fuyards, chacun d'entre eux pouvait alors sérieusement craindre pour sa vie ou son intégrité physique, malgré les assurances de façade du général Mladic en personne (sur ces assurances, cf. notamment Nouveau Quotidien, 4 juillet 1996 et film documentaire précité, de Channel Four). Il suffit, pour s'en convaincre, de se référer à l'Acte d'accusation du 16 novembre 1995 dressé contre Ratko Mladic et Radovan Karadzic devant le Tribunal Pénal International (publié sous forme d'extraits in: Le Monde, 27 juin 1996), en particulier aux chefs d'accusation pour génocide, extermination et violations des lois et coutumes de la guerre, ainsi qu'à la décision du 11 juillet 1996 rendue par la Chambre de première instance I du Tribunal Pénal International qui a qualifié "l'ensemble des faits relatifs à la chute de Srebrenica" de crime contre l'humanité (affaires IT-95-5-R61 et IT-95-18-R61; cf. également Rapport du Secrétaire général des Nations Unies, du 3 mai 1993, établi conformément au paragraphe 2 de la Résolution 808 (1993) du Conseil de sécurité, p. 10ss, ad compétence "ratione materiae" du Tribunal Pénal International). Partant, la commission arrive à la conclusion que les habitants de Srebrenica, qui ont personnellement vécu la prise de l'enclave en juillet 1995, ont été collectivement victimes d'une persécution indépendamment du degré de gravité des préjudices individuellement subis. Cela étant, il y a lieu de préciser que l'existence de cette persécution, qui répond également au premier critère cité au considérant 2b ci-dessus, ne permet pas encore, à elle seule, d'admettre la qualité de réfugié au sens de l'article 3 LA (cf. consid. 5 et 6 ci-après).

ff) En l'espèce, M. M. peut, à un double titre, se prévaloir d'avoir été soumis à de sérieux préjudices pour des motifs compris par l'article 3 LA. Retenu "de