1996 / 29 - 281

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A cet égard, l'autorité de céans constate que la Constitution de la Fédération Russe, adoptée le 12 décembre 1993 par voie de référendum, garantit aujourd'hui la liberté d'association et de réunion (art. 30 et 31). L'organisation d'une association n'est réprimée qu'en cas d'atteintes à la santé, à la personnalité ou aux droits des citoyens ou d'instigation à la violation des obligations civiles ou à la commission d'actes illicites (art. 143, 1er al. du Code pénal russe); une réunion dans un lieu privé ne saurait être illégale dès lors qu'elle ne porterait pas sur la commission d'une infraction. L'organisation d'un lieu de débauche, le proxénétisme (art. 226), ainsi que la production et la distribution de matériel pornographique (art. 228), constituent des infractions pénales qui ne visent pas à sanctionner les seuls homosexuels mais toute personne qui se rend coupable des faits incriminés.

C'est le lieu de rappeler que chaque Etat a légitimement le droit de prendre des mesures d'intérêt public visant à assurer le maintien de l'ordre public notamment. Ces mesures peuvent atteindre un individu dans sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté, sans pour autant qu'elles soient considérées comme déterminantes en matière d'asile. Elles ne deviennent illégitimes qu'à partir du moment où l'Etat intervient à l'encontre d'une personne pour des raisons non plus d'intérêt public, mais liées à sa race, à sa religion, à sa nationalité, à son appartenance à un groupe social ou aux opinions politiques. Il faut que, dans le cas concret, les mesures étatiques prises ou envisagées apparaissent objectivement disproportionnées par rapport aux buts d'intérêt public poursuivis et inspirées par des considérations politiques ou analogues (cf. W. Kälin, op. cit., p. 89s et 102ss; A. Achermann/C. Hausammann, op. cit., p. 41s; S. Werenfels, op. cit., p. 244ss, spéc. 248). La condamnation (non exécutée) ou la poursuite pénale est pertinente en matière d'asile lorsque l'Etat admet clairement qu'il cherche à atteindre la personne concernée pour des motifs d'ordre politique ou analogue, ou qu'il lui impute pour les mêmes motifs un délit qu'elle n'a pas commis, ou encore qu'il aggrave la situation de l'auteur du délit de droit commun pour des motifs déterminants en matière d'asile (cf. W. Kälin, op. cit., p. 113s). Tel n'est cependant pas le cas en l'espèce. 

En effet, il convient de constater d'abord que les convocations produites en instance de recours permettent de tenir pour établi que la recourante a été convoquée en qualité de témoin et non d'inculpée. A l'instar du droit suisse, le droit russe connaît la notion d'inculpé (art. 143 du code de procédure pénale de la RSFSR du 27 octobre 1960) de sorte que si la recourante avait été convoquée en tant que tel, la convocation aurait dû le mentionner expressément