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c) La recourante a fait valoir que son homosexualité lui a valu d'être soumise à un traitement médicamenteux forcé pendant son internement en milieu psychiatrique de deux mois d'une part et, d'autre part, d'être exclue de l'Institut universitaire à sa libération, c'est-à-dire au début du mois d'octobre 1992. Il convient d'examiner si ces faits, exposés de manière suffisamment précise et détaillée pour pouvoir être considérés comme des faits établis, sont déterminants pour la reconnaissance de la qualité de réfugié et l'octroi de l'asile au regard des circonstances régnant en Russie actuellement.

d) Les faits en question se sont déroulés entre les mois d'août et début octobre 1992, à une époque où l'homosexualité librement consentie entre adultes, hommes ou femmes, était sanctionnée par l'application directe ou indirecte du Code pénal russe, précisément de son article 121, 1er alinéa relatif à la sodomie. Ainsi que le démontrent les coupures de presse fournies, l'homosexualité féminine, bien que non visée formellement par ledit code, a été considérée comme une maladie justifiant l'enfermement psychiatrique, alors que l'homosexualité masculine, réprimée directement par la disposition précitée, était condamnée d'emprisonnement jusqu'à cinq ans.

e) Depuis le départ de la recourante de Russie, la situation a non seulement évolué, mais a également changé. Considérée comme un tabou par le passé, l'homosexualité est aujourd'hui un sujet discuté de manière plus ouverte dans la presse officielle. Plusieurs groupements inofficiels d'homosexuels, hommes ou femmes, se sont constitués malgré l'existence encore d'un haut degré d'hostilité dans la population. En dépit de certaines discriminations et des fortes pressions conservatrices dans ce domaine, le projet de modification du code pénal en tant qu'il sanctionnait l'homosexualité librement consentie entre adultes a abouti. L'article 121, 1er alinéa du Code pénal russe a été révisé par une loi, approuvée par un décret signé du président Eltsine le 29 avril 1993, et entrée en vigueur à la date de sa publication dans le journal parlementaire "Rossiyskaya gazeta", à savoir le 27 mai 1993. Ladite disposition est désormais libellée comme suit:

Article 121. Sodomie. Les relations sexuelles entre hommes (sodomie), entretenues par contrainte physique, menaces psychologiques, ou avec un mineur ou encore sur une victime en relation de dépendance ou sans défense, sont punies de l'emprisonnement jusqu'à sept ans.

A la suite de cet amendement, le Ministère de la Justice a déclaré que dans la mesure où la loi avait effet rétroactif, les personnes incarcérées en application