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Altun, Com. eur. D. H. 10308/83, par. 5 et 12ss). En d'autres termes, l'Etat qui, par son comportement (par exemple par une mesure de refoulement) facilite la commission ultérieure d'actes assimilables à de mauvais traitements, viole l'article 3 CEDH (Frowein/Peukert, EMRK-Kommentar, 1985, par. 18 et 22, p. 35 et 38).

bb) L'article 3 CEDH, qui érige le droit de ne pas subir des traitements contraires à la dignité de l'homme en un droit intangible, est un principe fondamental du droit international public, qui lie l'Etat partie à la CEDH appelé à prononcer l'exécution du renvoi et non l'Etat dans lequel est renvoyé l'étranger concerné (A. Wolffers, Kann eine Ausschaffung zur Folter rechtmässig sein ? in: Asyl 1994/1, p. 4; cf. aussi S. Trechsel, Grundrechtsschutz bei der internationalen Zusammenarbeit in Strafsachen, in: EuGRZ 1987, p. 74; ATF 112 Ib 224; 109 Ib 72; JICRA 1995 no 9, consid. 7c, p. 83s). Dès lors que l'Etat contractant a le devoir de ne pas mettre en danger l'intégrité corporelle d'un être humain, il n'y a pas lieu de traiter différemment les risques selon qu'ils proviennent d'agents étatiques ou de tiers; cela vaut d'autant plus que l'article 3 CEDH consacre l'une des valeurs fondamentales des sociétés démocratiques formant le Conseil de l'Europe et constitue une garantie absolue qui, contrairement à d'autres dispositions de la convention, ne souffre ni d'une exception matérielle pour cause d'ordre public ni d'une dérogation temporaire pour le cas de guerre ou d'un autre danger public menaçant la vie de la nation (R. Marx, Refoulementschutz für Bürgerkriegsflüchtlinge, in: ZAR 4/1995, p. 151ss, spéc. p. 153s). Dans une décision relative à un ressortissant colombien qui craignait la vengeance de narco-trafiquants, la Commission européenne a souligné que "seule doit être prise en considération l'existence d'un danger objectif", et que dans des affaires d'expulsion dont elle a précédemment eu à connaître, elle a pris en compte "un danger ne provenant pas d'autorités de l'Etat qui reçoit l'intéressé" (décision du 2 mars 1995, en la cause Hernando Loaiza-Ramirez, Com. eur. D. H. no 24573/94). De plus, la protection de l'article 3 CEDH s'étend à tout individu, quelle que soit le comportement délictueux qu'il ait pu adopter dans son pays d'origine ou d'accueil. C'est ainsi que dans une autre décision, relative à un ressortissant somalien qui était menacé d'un renvoi dans son pays d'origine à la suite d'actes délictueux qui le faisaient considérer comme représentant un danger pour la communauté du pays d'accueil, la Commission européenne a mis l'accent sur le fait qu'il n'y avait aucune relation de cause à effet entre la survenance de ces actes délictueux et l'éventuelle disparition du risque de mauvais traitements en Somalie (rapport du 5 juillet 1995 et décision