1995 / 5 - 46

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(Résistance passive au Kosovo, Le Monde, 10 novembre 1993), malgré les tentatives serbes visant à freiner, cas échéant par des mesures d'intimidation, leur développement. Le fait que plusieurs confrontations armées ont eu lieu en 1993 ne permet pas encore de conclure à l'existence d'une opposition armée, organisée et systématique marquant la fin de la politique de résistance pacifique des Albanais du Kosovo. Il s'agit, selon l'appréciation de l'autorité de céans, d'actes isolés qui ne découlent pas d'un appel à la résistance armée. A cet égard, force est de constater que malgré les distributions massives, par l'armée fédérale, d'armes aux civils serbes, qui se livrent fréquemment à des tentatives d'intimidation sur la population albanaise, le Kosovo n'a pas basculé dans la guerre civile, à savoir dans un conflit armé interne mettant aux prises le gouvernement établi avec un ou plusieurs mouvements insurrectionnels dont les buts tendent soit à renverser le gouvernement ou le régime de l'Etat, soit à obtenir la sécession d'une partie de cet Etat (cf. C. Piguet, La guerre civile en droit international, Lausanne 1982, p. 18) ni dans une situation de violence généralisée; il se trouve au contraire dans une situation de calme tendu ("gespannte Ruhe" selon les rapports des 8 juin et 20 septembre 1993 de l'Auswärtiges Amt, Bonn).

d) Ce constat est corroboré par le Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies (HCR) dans ses prises de position des 12 juin 1992, 12 février et 17 décembre 1993, et 29 avril 1994. Cette organisation a clairement indiqué qu'abstraction faite des réfractaires et déserteurs qui auraient refusé de se soumettre à un appel effectif sous les drapeaux durant le 2e semestre 1991 et le 1er semestre 1992, ses recommandations portant sur l'octroi d'une protection temporaire aux "réfugiés de la guerre" ne s'appliquaient pas aux Albanais du Kosovo étant donné l'absence, dans cette province, d'une guerre ouverte ou de violences généralisées ("open warfare or civil strife", rapport du 12 juin 1992), et ce malgré la volatilité de la situation qui y règne depuis 1989. Elle a précisé dans son document du 12 février 1993 que les violations des droits de l'homme se poursuivaient dans de nombreux domaines, en particulier en matière d'emploi; si certains licenciements étaient, à son avis, justifiés par des raisons économiques, le risque de pertes d'emploi causées par le refus d'allégeance au gouvernement serbe, voire par l'absence d'un soutien suffisant à sa politique, persistait avec toutes les conséquences néfastes que cela suppose sur le plan du logement et des assurances sociales. Aussi, en guise de conclusion, cette organisation internationale a-t-elle recommandé aux Etats tiers de prendre en considération, sur la base d'un examen individuel des cas, les situations de discriminations cumulatives, pour des raisons politiques ou analogues, dans la détermination du statut de réfugié, et en matière de renvoi,