1996 / 18 - 186

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ee) En ce qui concerne le degré de la preuve de mauvais traitements au cas où la mesure de renvoi serait exécutée, les organes de Strasbourg ont précisé qu'il faut que la personne qui invoque l'article 3 CEDH démontre à satisfaction qu'il existe pour elle un véritable risque concret et sérieux d'être victime de tortures, ou de traitements inhumains ou dégradants en cas de renvoi dans son pays (M. E. Villiger, Handbuch der Europäischen Menschenrechtskonvention, Zurich 1993, p. 185; A. Haefliger, Die Menschenrechtskonvention und die Schweiz, Berne 1993, p. 65). Les organes de la convention estiment qu'une simple possibilité de mauvais traitements n'entraîne pas en soi une infraction à l'article 3 CEDH (arrêt Vilvarajah précité, par. 111) et exigent la preuve "au-delà de tout doute raisonnable", fondée sur un faisceau d'indices ou de présomptions non réfutées, suffisamment graves, précis et concordants, sans qu'il faille exiger une certitude absolue (J. Velu/R. Ergec, La Convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles 1990, p. 203s; cf. aussi R. Marx, Refoulementschutz, op. cit., p. 155s). L'appréciation d'un risque de traitements prohibés nécessite l'usage de critères rigoureux, sur la base de l'ensemble des données disponibles, à savoir des connaissances sur le contexte prévalant dans le pays de destination, des antécédants personnels de l'intéressé, de ses déclarations et autres moyens de preuve fournis (Cour eur. D. H. arrêt Vilvarajah précité, par. 108; cf. aussi JICRA 1995 no 10, p. 99, consid. 5a). Il en ressort qu'une situation de guerre, de guerre civile, de troubles intérieurs graves ou de tension grave accompagnée de violations des droits de l'homme ne suffit pas, en règle générale, à justifier la mise en oeuvre de la protection issue de l'article 3 CEDH, tant que la personne concernée ne peut rendre hautement probable qu'elle serait visée personnellement - et non pas simplement du fait d'un hasard malheureux - par des mesures incompatibles avec la disposition en question (K. Hailbronner, Rechtsfragen der Aufnahme von Gewaltflüchtlingen in Westeuropa - am Beispiel Jugoslawien, RSDIE 4/93, p. 517ss, spéc. p. 530s; id., Der Flüchtlingsbegriff der Genfer Flüchtlingskonvention und die Rechtsstellung von De-facto-Flüchtlingen, ZAR 1993, p. 8s, et : Das Refoulement-Verbot und die humanitären Flüchtlinge im Völkerrecht, ZAR 1987, p. 10s; W. Kälin, Grundriss, op. cit., p. 205 et 237). En revanche, comme de telles situations sont caractérisées par un accroissement notable, en fréquence, en durée et en gravité, des violations des droits de l'homme, il importe d'en tenir compte dans l'appréciation globale, à l'instar des autres facteurs de risque que constituent les antécédants politiques ou religieux, l'origine ethnique ou sociale, ainsi que tous les autres éléments d'ordre personnel (R. Marx, Refoulementschutz, op. cit., p. 153ss). Cet examen doit être d'autant plus